lundi 26 octobre 2009

Doubt de John Patrick Shanley



Doubt de John Patrick Shanley

Il y a une chose qu'il faut comprendre, au préalable, pour pouvoir apprécier Doubt dans toute sa dimension : à la base, le film était une pièce de théâtre écrite par John Patrick Shanley, qui a lui-même écrit le scénario pour le cinéma et l'a réalisé, donc. Cette impression de pièce de théâtre est dès lors omniprésente dans la mesure où les dialogues ont une place extrêmement importante, ainsi que le jeu des acteurs, puisqu'il n'y a pas vraiment autre chose à vendre, comme dirait un spécialiste en marketing.

Le film n'est néanmoins pas assommant, soporifique comme les quelques récalcitrants au mot « théâtre » peuvent le redouter, à cause de trop de dialogues : Shanley assure une réalisation fluide, sinueuse, ne faisant pas bâiller, et étant capable de maintenir à un grand niveau d'attention le spectateur par des petits procédés de mise en scène, de scénario, qui induisent un certain suspens.


1964, New-York, école St-Nicolas.

La terrifiante directrice de l'établissement scolaire St-Nicolas, soeur Aloysius (Meryl Streep), plutôt de « l'ancienne école » comme on dit vulgairement, suspecte le père Flynn (Philip Seymour Hoffman) d'actes pédophiles à l'encontre d'un enfant noir, Donald Miller.

Pour l'aider à prouver que ces doutes ne sont pas infondés, elle demande de l'aide à la vertueuse soeur James (Amy Adams), qui, elle, croit, après un entretien privé avec le père Flynn que celui-ci est innocent...


Un résumé pouvant sembler barbant. Oui, je dois le reconnaître, le refrain est presque usé : le coup de la bonne-soeur acariâtre pas baisée qui veut enfoncer tout le monde, le mec trop sympa – on se demande pourquoi il est devenu prêtre- , la fille trop naïve qui n'ose pas ouvrir sa gueule, le thème du curé pédophile, les écoles catholiques, ça n'a rien d'extraordinaire me direz-vous.

Faux.

D'abord, ce n'est pas aussi facile que ça en a l'air : Le spectateur est amené, par choix de l'auteur de la pièce (puisque c'était d'abord une pièce de théâtre), a préférer croire en l'innocence du père Flynn, véritable progressiste, personnage attachant par son dévouement, par sa gentillesse envers les autres, et à détester soeur Aloysius, monstre de rigidité émotionnelle, n'hésitant d'ailleurs pas à user des stratégies les plus basses, et les moins catholiques si je peux me permettre, pour trouver une once de preuve contre Flynn.

C'est ici que les romains s'empoignèrent : ce qui reste le grand plaisir de ce film, c'est qu'on ne sait pas, nous, petites personnes derrière l'écran ce qui s'est passé. Nous sommes aussi paumés qu'il est possible de l'être, voguant, comme des balles de tennis, entre les protagonistes.

Si la plus grande force de Doubt réside dans la pression que le film pose sur les épaules de celui qui s'attelle à se délecter de la prestation amère et luciférienne de Streep, sa faiblesse demeure dans son démarrage, un peu lent, mais une fois que la machine est lancée, elle ne s'arrête pas, tourne de plus en plus vite.(Et les fleurs ne vont pas qu'à Meryl Streep: Philip Seymour Hoffman est parfait, incroyable, on a envie de le croire, de lui donner le bon Dieu, de le soutenir, et parfois de lui demander s'il ment. Quant à Amy Adams, même si son rôle n'est pas d'une grande envergure, d'une grande profondeur, son incarnation douce, un peu fuyante par moment, contraste très bien avec celle des deux acteurs principaux)


Doubt est donc une quête de la vérité, mais, à travers le doute.