samedi 10 juillet 2010

Toy Story trois



Il est rare que les suites surpassent les premiers opus, dans le monde du cinéma. Bien sûr, on dira que Le Parrain s’est bonifié pour le deuxième film, et que le troisième volet d’Indiana Jones est sans doute le meilleur de la série. Néanmoins, en règle générale, les scénaristes ont une bonne idée pour un premier film, l’appât du gain pour la suite transforme leurs cerveaux en masse informe et sans connexions synaptiques, juste bons à créer un plat réchauffé sans véritable dynamique.
Toy Story 3 pourrait bien être un de ces films qui se bonifie avec le temps. N’ayant vu que partiellement le premier – et n’ayant pas du tout accroché- et donc logiquement nié le deuxième, il s’agissait d’une découverte à proprement parler. A force de glaner des informations dans les bouches de plusieurs individus (constituant un échantillon aléatoire simple), j’en suis donc arrivée à la conclusion que Toy Story 3 devait être meilleur que le premier et le deuxième additionnés à un scone tapissé de clotted cream et de confiture de fraises.

Le premier Toy Story débutait sur une question importante : est-ce qu’un jouet peut être remplaçable ? Le jour où Buzz l’éclair est arrivé chez Andy, un petit garçon, ce dernier l’a préféré à Woody, son « meilleur ami », le jouet qu’il adorait. La grande question du film tenait dans la place qu’on pouvait donner à une nouvelle personne, à la jalousie.
Ici, dans Toy Story 3, le film débute sur la question du départ à l’université d’Andy : celui-ci, presque adulte, délaisse depuis des années ses anciens jouets, qui sont d’ailleurs déprimés à l’idée d’être probablement mis au grenier – ou pire à la poubelle.
Quel est le sentiment d’attachement d’un enfant à ses jouets ? Est-ce qu’en devenant adulte, l’enfant jette-t-il tout simplement ses jouets, reniant une part de lui-même ? Que deviennent les jouets après une vie bien remplie ? Peuvent-ils appartenir à d’autres ou doivent-ils rester fidèles à leur propriétaire ? Toutes les réponses à ces questions se trouvent dans le film, présentant d’emblée deux points de vue : celui de Woody, le fidèle cowboy, qui ne peut concevoir de passer sa vie loin d’Andy, et le point de vue des autres jouets, qui, eux, se sentent délaissés, oubliés, aspirant à devenir à nouveau des jouets à proprement parler.

Andy va partir à l’université dans quelques jours. Cédant à sa mère, il doit ranger sa chambre, et trier en trois sortes de caisses ses affaires : la caisse du grenier, celle de l’université, et enfin, la poubelle. Les anciens jouets d’Andy, entassés dans un coffre, craignent pour leur « survie » et essayent une nouvelle tentative désespérée pour capter l’attention du jeune homme. Alors que Woody, le cowboy, maintient fermement qu’Andy ne les jettera pas, Buzz, Rex, Jessie, Mr. Patate, Bayonne, Zig-Zag, sont convaincus du contraire et du fait qu’ils approchent de la retraite, malgré eux. Andy range ses affaires, et prend dans la caisse d’université Woody, tandis que les autres jouets atterrissent dans un sac poubelle, prévu pour aller au grenier. Bien sûr, tout ne se passe comme prévu, et la mère d’Andy apporte le sac poubelle dehors. In extremis, les jouets se sauvent, suivis par Woody, et se retrouvent embarqués dans une nouvelle aventure à la garderie, un soi-disant paradis pour les jouets, qui se trouve être plutôt un cauchemar à l’état pur -lorsqu'on est dans la classe des petits enfants- , orchestré par un ours diabolique et un singe effrayant.

Tout le monde connait Woody, Buzz, Jessie, Rex, Bayonne, Mr. Patate, qu'on retrouve avec un sourire ému, tant les personnages sont drôles, attachants, au point qu'on arrive à se dire qu'il faut qu'on récupère nos anciens jouets oubliés au grenier, alors qu'ils nous ont donné tant d'heures magnifiques. Le film suggère que justement, les jouets finissent toujours par retrouver une seconde vie : on les donne à nos petits frères et soeurs, à nos cousins, à nos voisins, à des enfants pauvres qui ne peuvent s'en acheter. Il y a un cycle de vie pour les jouets, qui, dépasse les limites d'une personne. Bien sûr, Woody, est convaincu du contraire : il ne vit que pour Andy, celui qui était son propriétaire aimant il n'y a pas encore si longtemps de ça. Cet attachement éloigne Woody de ses amis, pour qui, une autre vie est possible avec d'autres personnes. C'est une sorte de métaphore sur le deuil en général : dire aurevoir à ceux qu'on a aimé, à ceux pour qui nous n'avons plus la même importance.

Les nouveaux jouets introduits, et notamment l'ours en peluche Lotso, personnage riche et complexe du point de vue de sa psychologie, nous promettent des tranches de rigolade, et des séquences émotions. On note l'apparition très remarquée de Barbie – la poupée de la petite soeur d'Andy qui est donnée au début du film à la garderie – et Ken – ou le fils spirituel de Vincent Mc Doom et de Karl Lagerfeld – une sorte de dandy insupportablement fashion, qui donnera à tout le monde une crise d'asthme à force de rire.

En résumé, Toy Story 3 est un film à voir – la question de la 3D ne sera pas débattue ici, même si, foncièrement, elle n'était pas nécessaire. Une invitation à retourner en enfance, à éclater de rire devant Buzz en mode espagnol, devant Ken en séance de défilé de mode (si, si, avec une musique appropriée) : tous les ingrédients sont réunis pour faire de Toy Story 3 un grand film d'animation, drôle, émouvant, sincère, et qui laissera rêveur le public.