vendredi 25 décembre 2009

The english patient

Pendant la seconde guerre mondiale, en plein désert, un avion contenant un homme et une femme s'écrase dans le sable. L'homme, grièvement blessé ainsi que brûlé, est emmené par des nomades et remis entre les mains d'une équipe d'infirmiers. Se prétendant amnésique, personne ne détient d'informations sur l'identité de cet homme brûlé qu'on désigne par "le patient anglais".
Quelques temps plus tard, une infirmière canadienne, Hana, demande à son supérieur l'autorisation de rester avec le patient anglais en Italie, les déplacements étant trop éprouvants pour cet homme dont les jours sont comptés. C'est dans un monastère que le patient anglais vit ses derniers jours, se remémorant par flashbacks ce que fut sa vie avant la guerre, lorsqu'il était le comte Almasy, un géographe hongrois travaillant avec des anglais, faisant des cartes du Sahara et tombant amoureux de Katharine, une femme mariée, membre de l'équipe d'explorateurs.





En 1996, le monde du cinéma était en émoi devant cette histoire adaptée d'un roman au titre éponyme de Michael Ondaatje ; entre les diverses récompenses (oscars, bafta, golden globes) et les critiques plus que bonnes, Anthony Minghella, le réalisateur, se retrouvait dans les feux des projecteurs après trois précédents films.
Le casting plus que bon du film conforte aussi cette idée de grandeur, de millésime exceptionnel ; Ralph Fiennes n'avait pas encore une carrière comme aujourd'hui, mais son rôle dans "le Patient Anglais" écrivit définitivement son nom parmi les plus grands.

Le film s'ouvre sur une magnifique image du désert, de l'avion qui survole les vagues de dunes, et sombre très vite dans l'horreur de la guerre, de la mort : Almasy a le visage brûlé, est défiguré aussi bien physiquement que moralement. Sa rencontre avec Hana est d'autant plus émouvante que la jeune infirmière souriante est criblée de maux : son fiancé, ses amis meurent, elle en vient même à dire que tous ceux qu'elle aime ont tendance à mourir. Si elle insiste tellement pour rester avec le patient anglais dans le monastère, c'est pour reconstruire son esprit, tandis que le patient anglais accole, morceaux par morceaux, ce qui fut sa vie un bref instant.
Ce sont deux personnages brisés qui vont apprendre, une nouvelle fois, à aimer, à croire en quelque chose : Hana rencontre Kip, le spécialiste en désamorçage de bombes, et Almasy, lui, retrouve l'espoir et l'amour dans ses souvenirs, qui viennent le hanter au compte-goutte.

L'histoire d'Almasy est importante dans la mesure où elle est présentée d'une façon objective. Comme dit plus haut, il tombe amoureux de Katharine Clifton et a une aventure avec elle. On ne présente aucun des personnages du trio Katharine Clifton – Geoffrey Clifton – Almasy d'une façon désobligeante : il n'y a pas de jugement sur l'adultère, sur la tension. Le couple d'amants se sent coupable, vraiment mal et même s'ils se désirent avec l'ardeur d'une passion sans limite, ce n'est pas de leur faute s'ils s'aiment. Ce n'est finalement de la faute de personne si on tombe amoureux ou si on n'aime plus.
Katharine et Almasy ne se sont pas choisis : ils ont tout fait pour éviter de sombrer dans la dépendance, le comte hongrois n'hésitant parfois pas à dire des choses horribles à la jolie anglaise pour la décourager de l'aimer, et cette dernière oscillant entre les "on peut" et les "on ne peut pas".



Autre grand thème : les nations. Sans vouloir tout raconter, le film se passant pendant une grande partie pendant la guerre, les identités, les nationalités vont jouer un rôle fatal pour les protagonistes.
La partie avant-guerre raconte comment un groupe d'explorateurs, de diverses nationalités, s'unissent ensemble pour découvrir des choses, tisser ensemble des réalités concrètes. Ces réalités n'auront plus lieu de vérité après la guerre, lorsque la haine des étrangers, des autres, reprendra le dessus. On ne peut pas être ami avec son ennemi, c'est quelque chose décrété par des personnes au-dessus des expériences individuelles, enfermées dans un moule absolutiste dément, démunies d'un quelconque sens pratique, ou d'une infime volonté d'amitié.

"Le Patient Anglais" est bien sûr un film triste, dur pour les personnages qui ne sont pas épargnés, en toutes circonstances. La profondeur de l'interprétation de Juliette Binoche (Hana) lui a valu de nombreuses récompenses, entre-autres l'oscar de la meilleure actrice dans un second rôle, pour ce personnage "passerelle" entre deux mondes : celui qui était et celui qui est aujourd'hui.
Ralph Fiennes (Almasy) est poignant en solitaire écorché par l'amour interdit qu'il porte à une femme pour qui il pourrait tout faire, même se tuer.
Kristin Scott-Thomas (Katharine) est radieuse, à mi-chemin entre espièglerie et inquiétude.
Pour les seconds rôles, c'est avec beaucoup d'émotions qu'on les voit passer, certains amenant des vérités cruelles (Willem Dafoe), d'autres donnent envie au spectateur de les plaindre (Colin Firth).

Une histoire d'amour dans le désert, à une époque où tout est fait pour commencer à ségréguer les gens selon leurs origines, une histoire d'amitié en Italie, lorsque les fantômes du passé empêchent l'individu d'avancer.


samedi 19 décembre 2009

The Departed de Martin Scorsese



Quand on s'appelle Martin Scorsese et que derrière soi on traine une carrière dont la grandeur est connue au-delà des frontières de New York (ville tant aimée par le réalisateur), la probabilité de se planter en faisant un nouveau film est très proche de zéro ; l'expérience et le talent se mêlent pour donner quelque chose qui laisse sans voix.
En 2006, The Departed (Les Infiltrés comme titre français), un film traitant de deux infiltrés, un dans l'Unité Spéciale de la police de Boston (qui est donc de connivence avec la mafia), et l'autre (celui qui est un flic qui sert la police et pas la mafia), dans le gang de Costello (le chef de la mafia irlandaise de Boston). Les deux rôles principaux sont campés avec brio par Matt Damon (Sergent Colin Sullivan, l'infiltré dans la police), et Leonardo Di Caprio (William "Billy" Costigan), l'infiltré dans la mafia.
Parmi les seconds rôles, de très grands noms : Jack Nicholson, Mark Wahlberg, Martin Sheen, Ray Winstone, Alec Baldwin.

Colin Sullivan (Damon) grandit dans le quartier du sud de Boston, et dès son plus jeune âge, est pris sous l'aile du grand mafioso Costello (Nicholson). Trouvant vite sa "vocation", le jeune Sullivan fait l'académie de police, en sort avec des résultats extrêmement bons, ce qui lui vaut de se faire engager, dès sa sortie, dans l'Unité Spéciale dirigée par Ellerby (Baldwin) qui lutte contre le crime organisé, et donc, inévitablement, contre Costello.
De son côté, William Costigan (Di Caprio) est né avec le pedigree "famille dans le crime organisé", et cherchant à affirmer son identité en s'écartant de ses gênes, va, lui, aussi à l'académie de police. Juste avant la remise de son diplôme, Dignam (Wahlberg) et son supérieur, Queenan (Sheen), chargés du service des infiltrés de l'Unité Spéciale, le recrutent pour s'infiltrer dans le gang de Costello, pensant que les origines de Costigan et sa nature bizarre vont l'aider à paraitre crédible dans le rôle de la petite frappe.



D'abord, The Departed est un film rythmé, cadencé, dont le tempo parfait permet à la fois de ne pas s'ennuyer, et à la fois de comprendre ce qui se passe avec un peu de profondeur. La musique "I'm shipping up to Boston" des Dropkick Murphys y est sûrement pour quelque chose (le groupe est d'ailleurs originaire du sud de Boston), ainsi que la réalisation menée en main de maître par Scorsese, qui sait comment doser le suspens, l'énergie, le calme, la nervosité.

Les premières minutes du film installent les deux premiers rôles, et montrent les différences claires entre les deux principaux protagonistes, qui, jusqu'à la fin du film, seront toujours comme les deux faces d'une pièce.
Le personnage de Sullivan est clairement opposé à celui de Costigan. D'un côté, celui qui parait bien, gentil, propre, mais qui en réalité est un "rat" qui manipule ses équipiers pour aider celui qu'il appelle "papa" au téléphone, tandis que de l'autre côté, nous avons un jeune homme très nerveux, qui semble en conflit avec lui-même, qui veut sans doute racheter le tas de conneries de sa famille.
La scène qui témoigne le plus de cette antithèse est lorsqu'on voit Sullivan se promener dans un appartement onéreux qu'il décide de louer, comme ça, parce qu'il a un bon salaire, alors que Costigan, lui, aucune indication n'est vraiment donnée sur son domicile bien qu'on suppose qu'il vit dans la maison de sa défunte mère.
Le contraste est d'autant plus déroutant, que tout les deux vont tomber amoureux de la même femme, une psychiatre. Leurs attitudes vis-à-vis de cette jeune femme seront indicatrices de leur vraie nature, qui est finalement moins "tout noir, tout blanc" qu'on pourrait laisser croire facilement.
Ce qui est assez drôle, c'est que Costigan devrait être Sullivan, et inversement ; comme dirait Bourdieu, on ne peut rien faire contre le déterminisme ; ainsi donc, Costigan aurait dû être l'élève de Costello, sa taupe gentiment installée dans l'Unité Spéciale, et Sullivan, n'ayant pas au-dessus de sa tête le "Destin" aurait pu être - pourquoi pas - un infiltré dans la mafia.

Le jeu des acteurs est décapant, impossible d'y rester indifférent, les personnages étant riches du point de vue psychologique.
Sullivan est l'archétype du type au beau sourire qui, est fidèle à son "père", Costello. Damon est très convaincant, et pas caricatural, ce qui est déconcertant. Quant à Di Caprio, il brille réellement dans ce film, son interprétation semble très intuitive, mais magistrale : sans doute un de ses meilleurs rôles.
Nicholson est plutôt amusant, jouant un mafioso pas très "gros dur, je te casse les noix en deux secondes", mais plutôt cynique et sadique. Avec un humour qui me rappelait un peu le Joker de Batman, en beaucoup plus pervers (ce qui colle très bien avec ce bon vieux Jack).
Par contre, le rôle le plus dingue est celui de Wahlberg, presque méconnaissable en Digman, qui jure tout le temps, et doute de tout juste avant de redire un "fuck".

The Departed c'est une leçon de style, un coup de poing. Il est évident que Sullivan et Costigan vont se chercher l'un l'autre, et comme ils sont tous les deux des as de la fuite, des mecs entraînés à raisonner, à jouer avec la psychologie des gens qui bossent avec eux, ça promet d'être incroyable.
Film surprenant, au scénario bien ficelé (Il s'agit d'un "remake" d'Internal Affairs, un film venant de là où le soleil se lève, mais d'après Scorsese, The Departed ne s'en inspire que partiellement), avec des acteurs incroyables, des scènes qui coupent le souffle, et une fin d'un cynisme tordant.


vendredi 18 décembre 2009

Cold Mountain d'Anthony Minghella


Retour à Cold Mountain, Cold Mountain en anglais, est le cinquième film réalisé par Anthony Minghella, sorti en 2003, avec comme acteurs principaux Nicole Kidman, Jude Law, Renée Zellweger, racontant l'histoire d'un confédéré déserteur cherchant à revenir à sa bien-aimée.

Ada Monroe (Kidman), jeune femme de la bonne société, rejoint son père à Cold Mountain, petite ville de Caroline du Nord peu avant la Guerre de Sécession. Dès son arrivée, elle fait la connaissance du timide W.P Inman (Law) visiblement épris d'elle, et ne tarde d'ailleurs pas à tomber également sous le charme du jeune homme. Maintenant une relation très courtoise, leur histoire platonique est éreintée lorsqu'ils échangent enfin un baiser fougueux le jour où Inman part à la guerre, sous le drapeau des sudistes.

Les amoureux promettent de s'attendre.

Trois ans plus tard, Inman est toujours vivant, mais l'horreur de la guerre le ronge intérieurement. Le jeune homme finit par se faire blesser à la gorge, et est éloigné du champ de bataille. Un jour, une jeune femme lui lit une lettre d'Ada, qui lui annonce qu'elle est désespérée et qu'elle attend son retour. Inman décide de devenir un déserteur, et malgré les dangers que cela implique, de retourner à Cold Mountain, loin de cette folie humaine, près de celle qui fait battre son coeur.

Cold Mountain suit deux histoires : celle d'Inman, de son odyssée , et celle d'Ada, devant se débrouiller seule dans la ferme, son père étant mort. Heureusement pour la jeune femme, Ruby Thewes (Zellweger), vient la rejoindre et l'aider.

Cold Mountain raconte donc l'histoire d'amour à distance entre deux protagonistes, qui évoluent dans des milieux hostiles : les milices des villes où Inman passe, les rencontres malheureuses, la milice de Cold Mountain et leur folie meurtrière, l'hiver rude.

Tout au long du film, on se demande réellement si les personnages vont survivre aux désastres qui tombent sur eux, écrasant parfois tout espoir.

Parmi les rencontres marquantes d'Inman, il y a Veasey (joué par Philip Seymour Hoffman) le révérend obsédé par le sexe, et Sara (Nathalie Portman), la femme seule avec un jeune nourrisson malade qui prouve qu'elle a beau avoir un visage angélique d'une fragilité conséquente, elle sait se défendre. Toutes ces bribes de vies, ces personnages souffrant également de la guerre, dans des situations spéciales, rajoutent une dimension au film, lui donnant une humanité sans précédent.

Pourtant, la milice de Cold Mountain, par ses actes crapuleux, fait penser à tout sauf au terme « humanité ». Ils restent néanmoins des humains, avides de pouvoir, pensant avoir tous les droits (ce genre de personnage existe depuis toujours dans la vie de tous les jours).

Anthony Minghella aimait raconter de belles histoires d'amour, il l'avait prouvé avec Cold Moutain, et six ans plus tôt avec le magnifique « Le Patient Anglais ». Ses histoires racontaient comment des individus « normaux » se retrouvaient dans des situations « extraordinaires » et devaient s'extraire de problèmes relativement « mortels » (au sens propre).

C'est avec beaucoup de talent, une certaine poésie, que Minghella réalisa Cold Mountain, d'une façon certainement sobre, mais efficace. Félicitations à l'équipe technique (photographie, costumes, musique, décors), qui a rendu un travail digne d'un grand film.

Cold Moutain est un film long (mais pas lent), qui prend à la gorge, propulse le spectateur dans un état tantôt proche de l'effroi (les différents protagonistes nagent parfois dans la tragédie), tantôt semblable à un éclat de rire, la touche humour étant assurée par Zellweger.




mardi 15 décembre 2009

Kuzco l'empereur mégalo


Quand on parle de Disney, l'image populaire veut qu'on pense aux anciens (Blanche-Neige, Cendrillon, Le Roi Lion), aux nouveaux (dont l'excellent UP des studios Pixar), et pas aux éternels oubliés comme Taram et le Chaudron Magique, ou même encore Kuzco l'Empereur Mégalo aka The Emperor's New Groove in english please.

Kuzco est sorti en 2000 et est un des plus gros flops de Disney, et ce, malgré des bons échos (Rotten Tomatoes l'évalue même à 85%), des critiques plutôt bonnes.

C'est donc, tout naturellement si je puis dire, que j'ai décidé d'en parler ici, pour tenter de convaincre ceux qui n'ont pas eu la chance de voir ce petit dessin-animé à mourir de rire.

Kuzco est un empereur mégalo, c'est dans le titre français. Il est ce genre de personne que le commun des mortel fuit, à cause de la puanteur de son égo. Si Kuzco était une maxime, il serait sans doute « Moi, d'abord, et après, la tempête ». Autrement dit, l'empereur est le pire des enfoirés, qui ne pense à personne d'autre qu'à lui-même, peu lui importe le malheur des autres, ce qui compte, c'est lui, et lui seul.

(Vous avez compris je crois)


Sa vie change le jour où Pacha, le gentil chef d'un village de son royaume, vient le voir, sur la requête de l'empereur himself. Très vite, Kuzco est clair : il veut savoir quel est le meilleur emplacement pour placer sa future piscine, car, le village de Pacha va devenir ... Kuzcotopia, le paradis de Kuzco, une superbe résidence secondaire.

Pacha s'en retourne, les mains dans les poches, jusque chez lui, ne sachant que dire à sa famille et ses voisins qui vont devoir abandonner leurs maisons.

Le même jour (il s'en passe des choses), Kuzco décide de renvoyer Yzma, sa conseillère (qui adorerait être calife à la place du calife), et cette dernière le prend tellement mal qu'elle juge bon de se venger, aidée de son fidèle Kronk, en tuant l'empereur!

Le plan est très simple : Kuzco est invité à dîner en compagnie d'Yzma et de Kronk, un poison étant dissimulé dans son verre...

Mais grâce à Kronk, le poison se révèle être en réalité de l'extrait de lama, ce qui produit un tout autre effet : Kuzco est changé en lama, et sur l'ordre d'Yzma, Kronk doit l'emmener loin de la ville et le noyer. En définitive, Kronk ne le noie pas, et Kuzco se retrouve avec Pacha pour de superbes aventures dans la jungle.

Bon, ce résumé un peu easy ne témoigne pas d'un véritable humour, je l'accorde. Pourtant, Kuzco, c'est un film qui se regarde du début à la fin en riant, entre les frasques égocentriquement narcissiques de l'empereur, le côté « gentil mec prêt à tout pour sauver son village » de Pacha, la crapulerie (ce n'est pas un néologisme, bien vu) d'Yzma, et la personnalité attachante de Kronk qui est « l'homme aux muscles sans cervelle mais sympathique dans le fond ».

C'est un Disney, il y a une petite morale derrière, dans le style « arrête de te prendre pour le meilleur, tu ne vaux pas plus qu'un autre, reste zen, fume un joint ». Non, pas le joint. Bref, on s'en doute d'emblée, Kuzco va inévitablement changer au contact de Pacha, le bien triomphe du mal, et Yzma va se manger la gueule d'une façon cocasse. C'est sûr. Mais bon, même si on connait la fin d'avance, le voyage tient la route (ici, on rigole).