mardi 24 novembre 2009

Mesrine : L'ennemi public numéro un de Jean-François Richet

2 novembre 1979, porte de Clignancourt à Paris, une BMW est arrêtée à un feu rouge, derrière un camion dont la cargaison est bâchée. Soudain, la bâche se soulève, et des policiers armés tirent en direction du conducteur de la BMW dont le corps est rapidement criblé de balles. Tout se passe très vite après : les journalistes arrivent, on filme, on prend des tas de photos de Jacques Mesrine, mort, toujours au volant de sa voiture bien qu'affalé, tandis que sa compagne, Sylvia est emmenée à l'hôpital, grièvement blessée.
On le crie, on le hurle : l'ennemi public numéro un est mort, il n'y a plus de raisons de le craindre, c'est fini.




L'Ennemi Public Numéro Un, est le deuxième film de Jean-François Richet sur la vie très riche en méfaits de Jacques Mesrine, relatant la période du retour en France du malfrat, en 1972, jusqu'à l'inévitable apothéose de novembre 1979.

Résumé rapide de l'Instinct de Mort : Mesrine, revenu de la guerre d'Algérie, peine à trouver un boulot avant d'être abordé par un ami qui lui propose de faire ses premières marques dans la criminalité en commettant de petits vols.
De 1962 à 1963, il passe du temps en prison et décide, à sa sortie, de se ranger. Néanmoins, les choses ne se passeront pas si facilement pour lui financièrement et, il retournera à des occupations plus lucratives et punissables par la loi.
En 1968, avec sa dulcinée, Jeanne, il part pour le Québec où ils tentent quelques mois une vie sans histoires, avant de tomber dans la case "kidnapping-rançon-braquage". Ils seront arrêtés, se feront la malle, retourneront en prison, et Mesrine réussira encore une fois à s'échapper, avec son ami Jean-Paul Mercier.

Dans l'Instinct de Mort, même s'il nage dans les délits, Mesrine aspire, à deux moments, à retourner à une vie normale, une vie avec ses enfants (début des années soixante), et un quotidien tranquille de type "boulot-sexe-dodo" avec sa compagne sur le continent Américain. Par deux fois, il échoue, la faute à pas de chance, la faute au Destin peut-être. Il est toujours plus facile pour lui de retomber dans sa routine de brigand.

Avec l'Ennemi Public Numéro Un, nous n'avons plus le même personnage : Mesrine est fier de s'évader autant de fois qu'il le veut, arrogant dans sa manière de s'exprimer quand il s'agit de son soi-disant honneur de bandit (il ira même, peu avant sa mort, jusqu'au meurtre crapuleux d'un journaliste, qui, selon Mesrine, n'avait pas respecté sa personne en le traitant de personnage sans honneur). Mesrine ne peut plus considérer son existence sans la touche de criminalité ; il a besoin d'argent, de vivre dans le luxe, de sentir qu'il est encore apte à faire chier le système (lors d'un procès, il n'hésite pas à se foutre de la gueule de tout le monde en sortant une clef de sa poche, qui, ouvre ses propres menottes et qu'il a achetée à un flic pour une belle somme), de pouvoir se faire arrêter comme il l'entend (quand il offre le champagne à Broussard, qui vient l'arrêter dans son appartement en 73, après l'avoir fait patienter une bonne vingtaine de minutes histoire que "ça se passe sans violence"). Bref, Mesrine, dans ce volet ci, est définitivement irrécupérable, comme dirait l'adage, car plus rien ne peut l'arrêter, plus personne, il ira jusqu'au bout de son délire, même si c'est dans la mort.

Cassel épouse son meilleur rôle peut-être, en devenant le gangster le plus terrifiant des années soixante et septante, protagoniste complexe, dur à cuire, doté d'un certain culot, et d'un caractère plus que trempé ; "l'homme aux mille visages" ne pouvait trouver de meilleur acteur pour le jouer.
De très bons seconds rôles : Mathieu Almaric en François Besse est minutieux, Gérard Lanvin en Charlie Bauer vaut le détour, notre Olivier Gourmet national écope d'un rôle amené à être sympathique, bon et juste, Broussard.


Détail important : L'Instinct de Mort s'ouvrait sur ce fameux départ de la rue Belliard, du point de vue de Jacques Mesrine et Sylvia, déguisés, essayant d' être discrets, ayant peur d'être repérés, alors, qu'en réalité, ils sont déjà cuits. L'Ennemi Public Numéro Un finit sur le même départ, mais vu par les policiers cachés, guettant l'arrivée du malfrat et de sa compagne, terrifiés à l'idée que Mesrine découvre leur présence et foute en l'air la vaste opération menée ce jour là pour "arrêter" ce dernier à la porte de Clignancourt.

Jean-François Richet n'invente rien avec sa réalisation, mais se débrouille plus que bien, sans tapages, sachant doser les plans induisant du "suspens", rendant la fin de Mesrine presque inoubliable tant la tension peut se mesurer physiologiquement. Mesrine est un biopic, mais ne cède pas aux exigences larmoyantes du genre, après tout, il s'agit quand même de la vie d'un être dont la seule pensée épouvantait les employés des banques, et le reste de la population également.
Au final, au-delà des bonnes prestations des acteurs, on retient du film le portrait qu'il dresse d'un homme mondialement connu, ses hauts, ses bas, son humanité malgré ses crimes, sa vie tumultueuse et parfois même drôle.


Vidéos :

1° Début de l'Instinct de Mort :



2° Bande-annonce de l' Instinct de Mort :



3° Bande-annonce de L'Ennemi Public Numéro Un :

lundi 23 novembre 2009

BIO - Charlotte Gainsbourg




Charlotte Lucy Gainsbourg est née des amours polémiques de Serge Gainsbourg et de Jane Birkin, le 21 juillet 1971, à Londres. Amours polémiques médiatiques : ses parents sont à la une des journaux, la faute aux chansons érotiques qui découlèrent de l'album sorti en 1969 "Je t'aime... moi non plus", et aux scandales que Gainsbarre adore faire naître.
En parlant des tollés que Papa aime déclencher, il y a la sortie de la chanson Lemon Incest, chantée en duo avec Charlotte, en 1984, qui évoque la pédophilie, et l'inceste entre un père et sa fille, ou même encore le film "Charlotte for ever" (1986), sûrement autobiographique, racontant la dérive d'un homme ayant connu le succès qui n'est plus en vie que pour l'amour de sa fille appelée très sobrement Charlotte.

Née dans une famille d'artistes, il n'est pas étonnant que la petite Charlotte nourrit une passion pour le cinéma et désire devenir actrice : ses parents lui permettent de tourner des films alors qu'elle est encore très jeune, dont certains laisseront une trace indélébile dans la mémoire populaire ; "L'Effrontée" de Claude Miller (1985) lui rapportera une notoriété grandissante (il parait d'ailleurs que c'est en voyant la prestation de "la fille de" dans ce film que Sylvie Testud a décidé de devenir comédienne) et une récompense plus que convoitée : le César du meilleur espoir féminin.
Si les années nonante boudent un peu le talent de cette étoile franco-anglaise, elle s'illustre notamment dans "Jane Eyre" (1996) et "Merci la vie" (1990).
Ce n'est qu'en 1999 que Charlotte Gainsbourg revient au devant la scène avec une composition remarquable, celle de Milla dans "La Bûche", qui lui fait décrocher un nouveau César, en l'occurrence ici, celui de la meilleure actrice dans un second rôle.
Choisissant ses rôles, ayant une vie de famille (elle est mariée à Yvan Attal et tous les deux ont deux enfants), ses apparitions sont rares, et précieuses, bien que depuis 2004, elle se permet de tourner deux films par an.
Parmi les mets de choix de sa filmographie, il y a "Ma femme est une actrice" (2001) ,"21 grams" (2004), "La Science des Rêves" (2006) ou même "I'm not there" (2007).

En 2009, Charlotte participe au nouveau film controversé de Lars Von Trier, "Antichrist", qui, malgré un accueil des plus mitigés, offrira à son actrice principale le prix d'interprétation féminine au festival de Cannes.



Charlotte Gainbourg, en bonne fille de ses parents, pousse aussi la chansonnette, et pas que sous la douche : sa première chanson, un duo avec son père, était "Lemon incest", en 1984 ; elle fera quelques apparitions sur l'album "Charlotte for ever". Ultérieurement, elle s'essaye un peu à tout, participant par ci, par là, pour Les Enfoirés, faisant une intro sur une chanson de Madonna, jusqu'à son duo avec Daho "If" en 2003.
En 2006, "5:55" sort, mêlant chansons dans langue de Molière, et chansons dans la langue de Shakespeare.
Le nouvel album de Charlotte, "IRM", est attendu pour la fin de l'année 2009.





(La vidéo de Lemon Incest, en duo avec Serge Gainsbourg)

dimanche 15 novembre 2009

Capote de Bennett Miller, 2005





On the night of November 14th, two men broke into a quiet farmhouse in Kansas and murdered an entire family. Why did they do that? Two worlds exist in this country: the quiet conservative life, and and the life of those two men - the underbelly, the criminally violent. Those two worlds converged that bloody night.


Le 16 novembre 1959, Truman Capote, lit un article dans le New-York Times sur le meurtre de la famille Clutter à Holcomb, dans l'état du Kansas, et décide d'écrire son nouveau livre à propos de ce drame. Il se rend sur place avec son amie d'enfance, Harper Lee et mène sa petite enquête, en interrogeant toute personne liée à cette affaire, en se rendant sur les lieux du crime et même en voyant les corps des victimes dans leurs cercueils pour une impression plus exhaustive sur le sujet.
Le 30 décembre, Perry Smith et Richard Hickock, les tueurs de la famille Clutter, sont arrêtés à Las Vegas, et ramenés dans l'état du Kansas pour être jugés ; Capote les rencontrera grâce à ses contacts, en l'occurence, ici, à cause de son amitié avec Dewey, un agent du « Kansas Bureau of Investigation ». Très vite, Capote se lie d'une certaine façon à Perry Smith, personnage particulièrement mystérieux, sensible, dont l'auteur de « In Cold Blood » dira : « It's as if Perry and I grew up in the same house. And one day he stood up and went out the back door, while I went out the front ».

Divergeant des autres biographies par son aspect « intéressons-nous à l'acmé du personnage principal » (qui ne donne pas les débuts dramatiques et la fin scandaleusement triste, épargnons ceux qui vont voir le film), Capote est le genre de film qui remue son spectateur, le déstabilise, par les questions qu'il pose, les réponses qu'il ne donne pas (qu'il esquisse plutôt).
Nous avons Truman Capote, personnage reconnu pour la qualité de ses écrits, mais dont la notoriété n'est due qu' à ses talents d'orateur, d'amuseur de la jet set, qui, tombant sur un article de quelques lignes, décide d'en faire un livre, une non-fiction dont le sujet est un meurtre de « sang froid ».
L'arrivée de ce petit homme haut en couleur dans une petite ville où tout le monde se connait n'est pas des plus aisée, surtout lorsqu'il annonce à Dewey que peu lui importe qu'on trouve le coupable, il fera quand même un article, un livre, et que Dewey lui répond tout de go « moi, ça m'importe qu'on trouve le coupable ». Néanmoins, le charisme de Capote lui ouvrira plus de portes que ce qu'il voulait, même celle du coeur de Perry Smith, déroutant par son comportement, qui, à la fin, lui avouera ce qui s'est réellement passé la nuit du quatorze novembre 1959.

Le visage de Capote est également bizarre : il passe d'un sentiment à un autre, d'abord en étant très proche des deux tueurs, puis, en s'enfuyant : son contact sera toujours ambivalent, et parfois semblant hypocrite, alors qu'il s'agit peut-être simplement d'une manière de se protéger, pour lui, qui se sent proche de Smith par leur histoire passée (suicide de leurs mères, abandon) et ayant l'impression qu'il aurait pu devenir comme son ami promis à un destin funeste au bout d'une corde.
Il est amusant de constater aussi à quel point son attitude est différente selon qu'il est avec les tueurs (sa sensibilité est dès lors à fleur de peau), ou à New-York (où il raconte énormément d'histoires drôles, plaisante avec tous ceux qui ne demandent qu'à l'écouter).
C'est comme s'il y avait deux Truman Capote : celui d'Holcomb, qui écrit sur un fait divers et ses composants humains, et l'écrivain à la coupe de champagne qui n'hésite pas à dire – avec un grand sourire- que sur les quatre tableaux de Matisse que possède Marilyn Monroe, deux étaient placés à l'envers sur son mur.



Philip Seymour Hoffman a gagné l'oscar du meilleur acteur en 2006 pour sa prestation excellente de Truman Capote ; rôle pas évident à endosser à cause de la façon dont Capote agit en permanence, se tient, parle même (La voix, la façon caractéristique dont parlait le célèbre auteur). Le risque de tomber dans la caricature était très gros, mais par les choix de réalisation et de jeu de Seyour Hoffman, l'interprétation est d'une qualité grandiose, donnant une grande profondeur au personnage.
Soulignons aussi les très bons seconds rôles, en particulier celui de Perry Smith, joué par Clifton Collins Jr, dont le regard risque de hanter encore le spectateur, tant les émotions passent et repassent avec beaucoup de grâce à travers ses yeux.

« In Cold Blood » fut un succès immédiat dès sa sortie, mais sonna le glas pour Capote : son meilleur ouvrage le propulsa dans une dépression très grave, le plongeant dans l'alcoolisme jusqu'à la fin de sa vie, dix-neuf ans plus tard.


mercredi 4 novembre 2009

La belle personne de Christophe Honoré






L'homme a toujours donné une importance aux histoires d'amour, que ce soit à travers des poèmes, des romans, des pièces de théâtre, la musique, et depuis un siècle, avec la photographie et le cinéma.L'amour est donc un sujet inépuisable, souvent plus délectable quand impossible ou entravé par de nombreux désastres, laissant des déchirures indélébiles apparaissant sur les visages des personnages principaux, victimes combattant en héros jusqu'au dernier souffle les affres sentimentaux.

Christophe Honoré, réalisateur/scénariste français présentait son film « La belle personne », histoire librement inspirée de « La princesse de Clèves », il y a un an, sur arte, et dans les salles obscures.Le sujet du film, comme on peut s'en douter étant donné la courte introduction ci-dessus, est donc, l'amour, les sentiments amoureux - interdits ou encouragés -, la fidélité, la passion (et tout ce qu'elle implique), la fin tragique aussi.

Junie, seize ans, suite au décès de sa mère, part vivre chez son cousin Matthias, et fréquente le même lycée que ce dernier, où elle rencontre Otto, un jeune homme avec qui elle entame une relation amoureuse quelques temps après son arrivée.Le professeur d'italien, Nemours, véritable arracheur de coeur, s'éprend de Junie, et se laisse consumer par une passion qu'il espère rendre réciproque...

Mettons directement les choses au clair : ce film avait pourtant de bonnes bases (au niveau de l'histoire) pour donner un résultat assez intéressant, mais, faute à un scénario des plus facile, à un jeu d'acteurs excessivement exécrable, à une réalisation se voulant différente mais étant des plus lentes, ennuyeuses à cause d'un rythme qu'on peut qualifier « d'aussi constipé que les histoires d'amours adolescentes pré-pubères », on ne peut être que déçu.

On peut reprocher à Christophe Honoré d'être incapable de défendre les bonnes idées qu'il a au début de l'écriture et qui transparaissent très superficiellement dans ses quelques films comme « Ma mère », « Les chansons d'amour », et maintenant, « La belle personne ». On peut également désapprouver son besoin presque vital de faire traîner en longueur ses films, comme si, faute d'un scénario épatant, il devait rallonger une quantité incroyable de scènes, qui, en deviennent des plus inutiles.(Malgré toutes les reproches figurant ici, j'avoue avoir quand même apprécié « Les chansons d'amour ». Mais pas au point d'en faire un film culte, ou à se repasser toutes les semaines.)


« La belle personne » perd une (trop) grande partie de sa crédibilité à cause du jeu lamentable des acteurs : même Louis Garrel est foncièrement minable (et je m'en veux d'écrire une chose pareille sur un acteur étant capable de beaucoup mieux) à marmonner ses mots, de façon incompréhensible, avec des intonations inappropriées, et souvent absurdes. Grégoire Leprince-Ringuet, s'étant illustré dans « Les chansons d'amour » hérite d'un rôle « cinquième roue du carosse » ne poussant pas le spectateur à une quelconque empathie, tandis que Léa Seydoux est plus talentueuse lorsqu'elle ne dit mot. En réalité, les acteurs sont plus potables lorsqu'ils jouent de leur corps, et non pas de mots, car, lorsque leurs bouches s'ouvrent, c'est uniquement pour mâchouiller des phrases, rendant leur discours confus : en gros, même en montant le son, on ne comprend pas grand-chose.

Ce qui est dommage, et j'insiste sur ce mot, tient dans le fait que les ingrédients de base du film étaient promis à quelque chose de bon, et qu'au final, la cuisson a raté, Honoré n'a pas vraiment bien tamisé sa farine, il restait trop de grumeaux dans la pâte, c'est triste mais c'est comme ça. L'esthétique, trop laiteuse, les tons trop saturés, la lenteur du film, les personnages superficiels et stéréotypés, tout ceci endort avec beaucoup de grâce, mais ne rend pas compte d'une histoire d'amour, sur la passion, l'attente, l'interdit, la peur de perdre l'autre, la douleur de ne pas être aimé comme on aime, et, c'est vraiment triste.