dimanche 15 novembre 2009

Capote de Bennett Miller, 2005





On the night of November 14th, two men broke into a quiet farmhouse in Kansas and murdered an entire family. Why did they do that? Two worlds exist in this country: the quiet conservative life, and and the life of those two men - the underbelly, the criminally violent. Those two worlds converged that bloody night.


Le 16 novembre 1959, Truman Capote, lit un article dans le New-York Times sur le meurtre de la famille Clutter à Holcomb, dans l'état du Kansas, et décide d'écrire son nouveau livre à propos de ce drame. Il se rend sur place avec son amie d'enfance, Harper Lee et mène sa petite enquête, en interrogeant toute personne liée à cette affaire, en se rendant sur les lieux du crime et même en voyant les corps des victimes dans leurs cercueils pour une impression plus exhaustive sur le sujet.
Le 30 décembre, Perry Smith et Richard Hickock, les tueurs de la famille Clutter, sont arrêtés à Las Vegas, et ramenés dans l'état du Kansas pour être jugés ; Capote les rencontrera grâce à ses contacts, en l'occurence, ici, à cause de son amitié avec Dewey, un agent du « Kansas Bureau of Investigation ». Très vite, Capote se lie d'une certaine façon à Perry Smith, personnage particulièrement mystérieux, sensible, dont l'auteur de « In Cold Blood » dira : « It's as if Perry and I grew up in the same house. And one day he stood up and went out the back door, while I went out the front ».

Divergeant des autres biographies par son aspect « intéressons-nous à l'acmé du personnage principal » (qui ne donne pas les débuts dramatiques et la fin scandaleusement triste, épargnons ceux qui vont voir le film), Capote est le genre de film qui remue son spectateur, le déstabilise, par les questions qu'il pose, les réponses qu'il ne donne pas (qu'il esquisse plutôt).
Nous avons Truman Capote, personnage reconnu pour la qualité de ses écrits, mais dont la notoriété n'est due qu' à ses talents d'orateur, d'amuseur de la jet set, qui, tombant sur un article de quelques lignes, décide d'en faire un livre, une non-fiction dont le sujet est un meurtre de « sang froid ».
L'arrivée de ce petit homme haut en couleur dans une petite ville où tout le monde se connait n'est pas des plus aisée, surtout lorsqu'il annonce à Dewey que peu lui importe qu'on trouve le coupable, il fera quand même un article, un livre, et que Dewey lui répond tout de go « moi, ça m'importe qu'on trouve le coupable ». Néanmoins, le charisme de Capote lui ouvrira plus de portes que ce qu'il voulait, même celle du coeur de Perry Smith, déroutant par son comportement, qui, à la fin, lui avouera ce qui s'est réellement passé la nuit du quatorze novembre 1959.

Le visage de Capote est également bizarre : il passe d'un sentiment à un autre, d'abord en étant très proche des deux tueurs, puis, en s'enfuyant : son contact sera toujours ambivalent, et parfois semblant hypocrite, alors qu'il s'agit peut-être simplement d'une manière de se protéger, pour lui, qui se sent proche de Smith par leur histoire passée (suicide de leurs mères, abandon) et ayant l'impression qu'il aurait pu devenir comme son ami promis à un destin funeste au bout d'une corde.
Il est amusant de constater aussi à quel point son attitude est différente selon qu'il est avec les tueurs (sa sensibilité est dès lors à fleur de peau), ou à New-York (où il raconte énormément d'histoires drôles, plaisante avec tous ceux qui ne demandent qu'à l'écouter).
C'est comme s'il y avait deux Truman Capote : celui d'Holcomb, qui écrit sur un fait divers et ses composants humains, et l'écrivain à la coupe de champagne qui n'hésite pas à dire – avec un grand sourire- que sur les quatre tableaux de Matisse que possède Marilyn Monroe, deux étaient placés à l'envers sur son mur.



Philip Seymour Hoffman a gagné l'oscar du meilleur acteur en 2006 pour sa prestation excellente de Truman Capote ; rôle pas évident à endosser à cause de la façon dont Capote agit en permanence, se tient, parle même (La voix, la façon caractéristique dont parlait le célèbre auteur). Le risque de tomber dans la caricature était très gros, mais par les choix de réalisation et de jeu de Seyour Hoffman, l'interprétation est d'une qualité grandiose, donnant une grande profondeur au personnage.
Soulignons aussi les très bons seconds rôles, en particulier celui de Perry Smith, joué par Clifton Collins Jr, dont le regard risque de hanter encore le spectateur, tant les émotions passent et repassent avec beaucoup de grâce à travers ses yeux.

« In Cold Blood » fut un succès immédiat dès sa sortie, mais sonna le glas pour Capote : son meilleur ouvrage le propulsa dans une dépression très grave, le plongeant dans l'alcoolisme jusqu'à la fin de sa vie, dix-neuf ans plus tard.